09/12/2006

9 décembre 1936

Monsieur, je tremble ce soir de prendre la plume pour vous écrire ces mots, je ne sais s'ils vous atteindront. Il fait si froid ici, et je ne peux me résoudre à croire ce que vous dites. Vous n'êtes pas Robert ! Qui êtes-vous pour me tourmenter ainsi ? Comment par miracle vos lettres arrivent-elles, sans timbres, dans ma boite ? Je ne sais même pas comment envoyer cette lettre que je suis en train d'écrire, dois-je la jeter par la fenêtre ? Dois-je la manger et faire trois fois une ronde ? Vous semblez incohérent, vous me parlez de grands noirs et de files d'attente, mais je ne vois pas comment vous pouvez communiquer avec moi. Vous connaissez beaucoup de choses sur Robert, mais les temps sont, il me semble, peu propices à une blague puérile. Je suis déjà épuisé par l'erreur que je suis en train de commettre, perdre mon temps à écrire à quelqu'un qui se moque de moi. Je suis diminué, je n'ai pas la force de débattre avec un fantôme. Il y a déjà trop de présences autour de moi, je ne pourrai en prendre une supplémentaire, j'ai trop souffert et je n'accepterai pas que ce chagrin vous soit profitable. Je ne peux vous aider que si vous me donnez un preuve irréfutable de qui vous prétendez être. Je veux toucher vos plaies. Car... malgré tout... c'est votre écriture... votre ton n'est pas juste, mais ce que vous écriviez et ce que vous étiez étaient deux choses très différentes... vous connaissiez Robert..; c'est évident. Même si c'est une blague, je veux savoir. C'est pourquoi, cette lettre, pour qu'elle vous parvienne, je l'enverrai ce soir. Par la poste traditionnelle. A l'hotel indiqué. Je me suis demandé quel timbre je devais mettre. J'ai opté pour la solution la moins couteuse, deux dollars, deux oboles pour le passage. J'attendrai la réponse le matin, près de ma boite, pendant deux jours après l'envoi de cette missive, pour guetter une main.

adieu

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